Dialogue et fractures sur la scène européenne et mondiale

Article
Publié le 31.01.2025 à 08h35 Mis à jour le 31.01.2025 à 16h57

L’hémicycle strasbourgeois du Conseil de l'Europe a accueilli du 27 au 31 janvier 2025 sa première session plénière sous présidence luxembourgeoise, ceci dans l'ombre mémorielle des 80 ans de la libération d'Auschwitz-Birkenau. Le ministre des Affaires étrangères et du Commerce extérieur, Xavier Bettel, qui préside actuellement le Comité des Ministres, y a présenté ses priorités, tandis que le Premier ministre Luc Frieden, s’est également adressé aux membres de l’assemblée. 

Les parlementaires se sont penchés sur les crises qui ébranlent le monde, de l'Ukraine à Gaza, en passant par le Bélarus et la Géorgie, ainsi que sur l’impératif d’un nouvel ordre international fondé sur le respect des règles. La protection de la profession d’avocat figurait également parmi les sujets majeurs à l’ordre du jour.

La délégation luxembourgeoise était représentée par Gusty Graas, Octavie Modert, Yves Cruchten, Paul Galles, Stéphanie Weydert et Alexandra Schoos.

APCE 01-2025 - members + PM
La délégation luxembourgeoise auprès de l’APCE avec le Premier ministre, Luc Frieden

La délégation géorgienne se retire de l’Assemblée

Au vu des récents développements et d'un recul préoccupant des principes démocratiques en Géorgie, la délégation s'est vu contester ses pouvoirs dès l'ouverture de la session. Si l'Assemblée a finalement opté, par voie de résolution, pour une ratification des pouvoirs des représentants géorgiens, celle-ci s'accompagne néanmoins de restrictions significatives. Les membres se voient notamment privés de certaines prérogatives essentielles, dont le droit d'exercer la fonction de rapporteur. Cette décision est assortie d'une clause de réexamen lors de la prochaine session, conditionnée à des avancées démocratiques concrètes : l'organisation d'élections parlementaires répondant aux standards internationaux et la libération sans délai de l'ensemble des prisonniers politiques d'ici avril figurent parmi les exigences. En réaction à ce vote, la délégation géorgienne a annoncé son retrait des travaux de l’Assemblée. Cette confrontation intervient paradoxalement quelques moments seulement après les appels au dialogue constructif formulés par le Premier ministre luxembourgeois, soulignant ainsi le fossé croissant entre les intentions diplomatiques et la réalité du terrain.

 

Le président de la délégation luxembourgeoise, Gusty Graas, a qualifié de regrettable le retrait de la délégation géorgienne des travaux de l’Assemblée. 

« Un revers pour les perspectives d'intégration européenne de la Géorgie, qui s'éloigne ainsi davantage des valeurs fondamentales défendues par le Conseil de l'Europe »

Gusty Graas, Président de la délégation luxembourgeoise auprès de l'APCE

La crise humanitaire concernant les femmes, les enfants et les otages à Gaza

Face à l'escalade de la crise humanitaire à Gaza, l'Assemblée a multiplié les appels à l'action lors de sa dernière session. Les parlementaires ont notamment exhorté toutes les parties à mettre en œuvre le cessez-le-feu en trois phases, condition sine qua non d'une paix durable. Une attention particulière a été portée à la situation de l'UNRWA, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, actuellement bloquée par Israël : l'Assemblée a demandé la levée immédiate de ces restrictions et réclamé un accès sans entrave pour les organisations humanitaires et les médias. 

 

Intervenant dans ce débat, Gusty Graas lors de ce débat a souligné l'importance cruciale du nouvel accord de cessez-le-feu, obtenu grâce aux efforts diplomatiques de l'Égypte, du Qatar et des États-Unis. Face à un bilan humain catastrophique de plus de mille soldats israéliens morts et des dizaines de milliers de victimes palestiniennes, majoritairement des femmes et des enfants, le parlementaire a insisté qu'il ne s'agit pas d'une « simple option diplomatique, mais d'une nécessité morale absolue ». L'accord prévoit notamment la libération des femmes et des personnes de moins de 19 ans, ainsi que le retrait progressif des troupes israéliennes, bien que sa mise en œuvre reste fragile dans un contexte géopolitique tendu.

La convention pour la protection de la profession d’avocat

Les parlementaires ont exprimé un large soutien au projet de Convention visant à protéger la profession d'avocat. Insistant sur le rôle fondamental des avocats dans l'administration de la justice et la préservation de la confiance du public dans le droit, l'APCE a souligné l'importance d'une adoption à large échelle. Dans cette optique, il est prévu que la convention soit ouverte à l’adhésion de tout État, y compris ceux ne faisant pas partie du Conseil de l'Europe.

 

Prenant part au débat, la députée Octavie Modert a salué cette avancée qu'elle considère comme « un pas de plus vers un espace juridique commun ». Elle a insisté sur la nécessité d’exclure toute possibilité pour les États d’émettre des réserves sur certaines dispositions du texte, mettant en garde contre le risque d’affaiblissement du dispositif. Un tel mécanisme pourrait vider « de substance » la convention, a-t-elle averti, plaidant pour une interdiction explicite de toute réserve. Concluant son intervention, Octavie Modert a souligné que ce « nouvel instrument de droit universel à portée mondiale confirmera le rôle précurseur et protecteur des droits humains du Conseil de l'Europe ».

L’avis formulé par l’APCE a été transmis au Comité des Ministres, qui pourrait décider d’ouvrir la convention à la signature lors de sa prochaine réunion ministérielle.