À quand un vote sur l’imposition minimale à 15% des grands groupes ?

Article
Publié le 05.12.2023 à 15h21 Mis à jour le 05.12.2023 à 15h22

La question du calendrier reste ouverte après un débat en commission sur la transposition en droit national de la directive Européenne basée sur l’initiative BEPS (lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices) de l’OCDE qui est censée entrer en vigueur pour l’année fiscale 2024.

ArcelorMittal, Goodyear, Amazon et Ferrero sont quelques-unes des entreprises implantées au Luxembourg dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions d’euros et qui tomberaient ainsi sous le champ d’application d’une imposition minimale à 15% dans l’UE. Ces noms sont cités par la Chambre des Salariés dans son avis au sujet du projet de loi 8292, abordé ce mardi 5 décembre en commission des Finances.

La même Chambre des Salariés souligne cependant, après avoir cité ces entreprises, qu’il sera beaucoup plus difficile dans de nombreux cas d’évaluer si des sociétés faisant partie de montages financiers plus complexes sont concernées par les critères de ce que l’on appelle communément le « Pillier 2 » du BEPS.

 

Un dossier « majeur et d’une grande complexité technique » a souligné le ministre des Finances Gilles Roth, qui a donné quelques explications sur les cas de figure dans lesquels les mécanismes s’enclencheraient :

 

  • Une imposition que chaque État membre peut appliquer pour arriver au taux de 15%.
  • Une imposition que le pays où se trouve le siège d’une société peut appliquer si les impôts du groupe dans son ensemble sont en deçà du taux de 15%.
  • Si un groupe dispose d’antennes dans des zones non imposables, un mécanisme qui fixe une imposition dans les zones où le groupe est implanté et qui sont imposables.

     

Les députés ont voulu savoir ce que cela signifierait concrètement pour le Luxembourg et si l’implémentation de ces mécanismes allaient mener à une augmentation des recettes fiscales. Le ministre des Finances n’a pas souhaité se positionner sur ce point. Cependant, des chiffres plus globaux ont été évoqués pendant la réunion au sujet du « Pillier 2 », faisant état de rentrées fiscales au niveau mondial (également hors UE) situées entre 150 et 220 milliards de dollars (USD) par an.

La commission des Finances s’est déjà réunie cinq fois depuis le début de la nouvelle législature.
La commission des Finances s’est déjà réunie cinq fois depuis le début de la nouvelle législature.

Le calendrier parlementaire reste à déterminer

 

Bien que, selon certains députés, le texte fasse partie d'« une tendance dans laquelle les textes européens sont incompréhensibles, même pour les politiques » et que « l’on puisse douter du caractère démocratique de lois que les gens ne comprennent pas », son application en droit luxembourgeois, en tant que directive de l’UE, n’a pas été mise en cause.

 

Les questions de calendrier et d’application n’ont cependant pas pu être définitivement réglées lors de la réunion de la commission des Finances. La directive prévoit une entrée en vigueur des mesures au 31 décembre 2023. Or, les travaux parlementaires n'en sont pas encore à un stade qui peut garantir un débat et un vote serein en séance publique, sentiment qui a été partagé par la plupart des députés, d’autant que le projet de loi et les amendements gouvernementaux dont il a fait l’objet n’ont pas encore été avisés par le Conseil d’État.

 

Ainsi, la question de la marche à suivre s’est posée en commission sans qu’une réponse définitive ne se soit dégagée à l’issue de la réunion. Laurent Mosar (CSV), qui a été désigné rapporteur du projet de loi, s’est d’emblée déclaré défavorable à toute tentative de presser le pas et de faire passer le projet de loi avant la fin de l’année, affirmant que la Chambre devait disposer du temps nécessaire afin de pouvoir travailler consciencieusement dans ce dossier. Le ministre des Finances Gilles Roth, tout en insistant sur le fait que la détermination du calendrier était la prérogative de la Chambre, a exprimé sa préférence pour une entrée en vigueur au cours de l’année 2024. Le concept d'une application rétroactive des mesures sur les premiers mois de l’année fiscale a également été abordé pendant la discussion.

Un député de l’opposition a quant à lui exprimé sa préférence pour une entrée en vigueur pour l’année fiscale 2025, exprimant son scepticisme sur une entrée en vigueur en cours d’exercice.

 

Où en sont les autres pays en ce qui concerne la transposition de la directive ?

 

Les députés ont voulu savoir si les pays voisins étaient en bonne voie pour appliquer la directive à temps. Un membre de l’équipe du ministre a affirmé que la Belgique allait passer à un vote sous peu, que la France avait appliqué les mesures dans sa loi budgétaire qui devrait entrer en vigueur pour la fin de l’année, tout comme l’Irlande, et que l’Allemagne allait également probablement se doter des mécanismes requis d’ici à la fin de l’année.

 

Des rapporteurs désignés pour deux autres projets

 

La réunion a été l’occasion de désigner des rapporteurs pour deux projets de loi :

  • Maurice Bauer (CSV) a été désigné rapporteur du projet de loi 8257 approuvant la contribution de 61,21 millions d’euros de la part du Luxembourg à la vingtième reconstitution de l’AID (Association internationale de développement). Cela équivaut à 0,21% du budget total.

     
  • Diane Adehm (CSV) a été désignée rapportrice du projet de loi 8344 qui concerne notamment les biocarburants dans le secteur du transport dans le cadre du PNEC (Plan national intégré en matière d'énergie et de climat).