« Platzverweis », interdiction de la mendicité et création d'une unité de police locale
Un projet de loi « Platzverweis » sera déposé en début de l’année 2024. C’est ce qu’a confirmé le ministre de la Sécurité intérieure Léon Gloden ce mercredi 13 décembre aux membres de la commission parlementaire lors de la présentation de l’accord de coalition concernant un de ses trois volets ministériels. Les députés du LSAP et de déi gréng ont demandé au ministre d'expliquer sa décision concernant « l'interdiction de la mendicité à Luxembourg-Ville ».
Lors de la présentation des grandes lignes de l’accord de coalition, le nouveau ministre Léon Gloden a affirmé sa volonté d'introduire un projet de loi visant à renforcer le « Platzverweis » afin de permettre à la Police Grand-Ducale la sauvegarde effective de l’ordre public. Les députés ayant demandé des précisions, le ministre a expliqué vouloir mettre en place une mesure de déguerpissement (« Platzverweis ») sans « zones grises ». Pour rappel, les députés avaient voté en juillet 2022 une mesure donnant la possibilité à la Police d’éloigner une personne qui entrave l’entrée ou la sortie d’un bâtiment public ou privé.
Interdiction de la mendicité dans certaines rues de la capitale
Ces discussions se sont inscrites dans le contexte d’une demande des députés du groupe politique LSAP et de la sensibilité politique déi gréng au sujet de la décision de Léon Gloden d’annuler la décision de son prédécesseur concernant l’interdiction de la mendicité dans certaines rues de la capitale. Pour rappel, au printemps dernier la ministre de l'Intérieur de l'époque, Taina Bofferding, avait fait savoir que l'interdiction de la mendicité dans la capitale ne pouvait pas entrer en vigueur. La capitale avait dès lors introduit un recours.
D’emblée, Léon Gloden a précisé que le but était de lutter contre la « mendicité organisée agressive ». En outre, il a expliqué que le Luxembourg (ainsi que la Ville de Luxembourg) offre des services sociaux et des structures de nuit pour les personnes dans la rue. Finalement, il a affirmé détenir d'assez d’arguments juridiques pour annuler la décision prise par son prédécesseur il y a quelques mois seulement. Selon le ministre, l’arrêt (Lacatus c. Suisse) de la Cour européenne des droits de l’homme – souvent cité dans le cadre de cette affaire – ne peut pas être comparé à la situation de la Ville de Luxembourg. Selon Léon Gloden, l’interdiction de la mendicité ne s’applique pas à l’ensemble du territoire de la capitale. Qui plus est, l'interdiction est limitée à des horaires spécifiques, a-t-il ajouté.
En outre, il a précisé que le règlement ne va pas contre les dispositions de la nouvelle Constitution, comme cela a été déclaré par un député lors des discussions. Léon Gloden a explicité que la mendicité agressive est repréhensible selon le Code pénal luxembourgeois. Interrogé par les députés sur les prochaines étapes, le ministre a annoncé que le règlement entrera en vigueur ce vendredi. Dans une première phase, il est prévu que les mendiants seront informés par un flyer sur l'adaptation des règles. Dans une deuxième phase, ils pourront être verbalisés. Plusieurs députés de l’opposition ont manifesté leur désaccord avec cette décision du nouveau gouvernement.
Les volets « sécurité intérieure » de l’accord de coalition présenté en commission
Un autre « projet phare » de l’accord de coalition tel que défini par le ministre Léon Gloden est celui de l’introduction d’une unité de police locale. D’emblée, le ministre précise qu’il ne s’agit pas d’une « nouvelle police », mais que cette unité sera intégrée au sein de la Police Grand-Ducale. Il est prévu que les policiers locaux suivront la même formation que celle actuellement prévue par tous les agents de la Police, a précisé Léon Gloden. Une unité de police locale devrait être « mise à disposition » du bourgmestre et ce dernier aura un pouvoir de direction dans le cadre de ses missions d’ordre public, a ajouté le ministre Gloden.
Un député de l’opposition a douté que cette unité de police locale ait « assez de travail ». Le ministre est d’avis qu’une telle unité présente une mesure préventive avec une « plus-value réelle ». Il ne partage pas les doutes concernant le fait que les policiers locaux risquent de ne pas être assez sollicités par les bourgmestres. D’après le ministre, la collaboration entre les agents municipaux et cette unité locale devrait être un bon modèle pour le futur. Suite à la précision d’un député, le ministre a confirmé ne pas vouloir doter les agents municipaux d’une arme à feu.
Vers une installation de caméras de surveillance dans des espaces publics
Les députés de l’opposition ont demandé des renseignements supplémentaires quant à la volonté du ministre de revoir la procédure d’autorisation de la surveillance par des caméras dans l’espace public (la loi « Visupol ») et d’installer des caméras dans les transports publics. Ne serait-ce une mesure disproportionnée, a demandé un député de l'opposition. Léon Gloden a souligné que certains espaces publics, comme des gares ou des arrêts de bus de grands pôles d’échange, devraient être dotés de caméras de surveillance.
Interrogé par un député de l’opposition au sujet de l'équipement des policiers en « bodycams » comme prévu par la loi votée en juillet dernier à la Chambre (dossier parlementaire 8065), le ministre a confirmé que l’appel d’offres devrait être publié au début de l’année 2024. Parallèlement, la Police devrait mettre en place les infrastructures informatiques nécessaires et former les agents à l’utilisation de ces caméras piétons, a-t-il ajouté.
Quid de l'équipement des policiers avec des « tasers », a demandé une députée de l’opposition en réaction à une déclaration récente du ministre. Léon Gloden compte d’abord évaluer la situation et se renseigner sur les conclusions tirées de l’utilisation de ce pistolet électrique dans d’autres pays, notamment à Trêves en Allemagne.
La même députée a demandé des renseignements quant à la déclaration du Ministre de vouloir introduire une reconnaissance automatisée des plaques d’immatriculation. Léon Gloden a précisé vouloir d’abord équiper les autoroutes avec de tels systèmes de reconnaissance. En outre, il a précisé qu'un tel système devrait favoriser la coopération avec les autres pays de l’UE notamment dans le contexte d’échanges d’informations. Un sujet évoqué lors du premier rendez-vous européen du nouveau Ministre de la Sécurité intérieure au Conseil « Justice et affaires intérieures » de l’UE.
Au mois de janvier 2024, le ministre devrait présenter le volet « Immigration » de l'accord de coalition aux députés en commission parlementaire.