Une législation nationale pour le devoir de vigilance des entreprises ?

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Publié le 15.06.2023 à 14h53 Mis à jour le 15.06.2023 à 14h53

Faut-il légiférer au niveau national pour contraindre les entreprises à respecter les droits humains et les aspects d’écologie et de durabilité tout au long de la chaine de production ? Les membres de la Commission de l’Économie ont pris position ce jeudi 15 juin 2015. L’occasion était la présentation d’une proposition de loi des députés Nathalie Oberweis (déi Lénk) et Sven Clément (Piraten).

Instaurer une loi de devoir de vigilance en matière de durabilité, c’est l’objectif de la proposition de loi 8217. Le texte, déposé par deux députés de l’opposition, vise à « établir les obligations des entreprises en matière d’incidences négatives réelles et potentielles sur les droits humains et sur l’environnement, en ce qui concerne leurs propres activités, les activités de leurs filiales et les activités menées dans leur chaîne de valeur par des entités avec lesquelles l’entreprise a une relation commerciale ». La proposition de loi prévoit que les entreprises mettent en œuvre un « plan de vigilance » « pour éviter des atteintes graves aux parties prenantes, au climat ou à l’environnement ».

 

La proposition de loi ne vise pas l’ensemble des entreprises luxembourgeoises, mais celles remplissant deux des trois critères suivants :

  • employant au moins 250 personnes,
  • un chiffre d’affaires dépassant les 50 millions d’euros par an
  • un bilan de plus de 43 millions d’euros.

La création d’une instance de contrôle est également prévue. Cette autorité devrait pouvoir sanctionner des manquements, mais aussi conseiller les entreprises dans leur démarche en élaborant par exemple des guides pratiques.

 

La démarche ne fait pas l’unanimité

Lors de la présentation de leur proposition de loi en commission parlementaire, les deux auteurs ont évoqué différentes initiatives au niveau national et international à l’instar des législations françaiseet allemande (Lieferkettengesetz) en faveur d’un cadre légal national. Ils s’appuient sur une plateforme regroupant 17 différentes organisations syndicales et de la société civile et évoquent un business statement signé par une cinquantaine d’entreprises au Luxembourg pour avancer dans ce sens.

 

Si les objectifs du texte sont largement partagés politiquement, la manière de procéder au niveau législatif ne fait pas l’unanimité. Les représentants du CSV, du DP et du LSAP se sont prononcés en faveur d’un cadre européen. Selon eux, l’importance est de garantir le level playing field, les mêmes règles à respecter pour les entreprises luxembourgeoises que pour celles des autres pays. Cet aspect est jugé important dans une économie aussi ouverte que la luxembourgeoise. Le représentant de déi gréng soutient l’instauration d’une loi nationale.

 

Concernant l’argument de la compétitivité avancé par les députés opposés à une législation nationale sans cadre européen, les auteurs de la proposition de loi sont d’avis que des contraintes au niveau national pourraient préparer les entreprises à mieux répondre aux exigences d’un cadre européen le jour où ce dernier serait en place. Un représentant du Ministère de l’Économie a confirmé aux députés qu’une législation européenne était en préparation et que le trilogue européen, des négociations entre le Parlement, le Conseil et la Commission, était engagé.

 

Certains députés souhaitent aller plus loin qu’une directive européenne. Le représentant du CSV s’est prononcé en faveur d’un règlement européen, d’application directe pour l’ensemble de l’espace européen. Il a également évoqué l’importance de règles communes au niveau de l’OCDE. Plutôt que de sanctionner les entreprises pour d’éventuels manquements, le député privilégie des mesures incitatives. Une entité de la place financière devrait être exemptée de la taxe d’abonnement si elles respectaient pleinement des standards de diligence.

Des règles pour les minerais de conflit

La législation luxembourgeoise contient d’ores et déjà des obligations pour les entreprises en matière de vigilance. Mardi dernier, les députés ont adopté en séance publique un projet de loi qui régule le commerce des minerais de conflit. Le projet de loi 7787 met en place des règles pour la chaîne d’approvisionnement de l’étain, du tantale et du tungstène, leurs minerais et de l’or (appelés les 3TG). 

 

La proposition de loi 8217 des députés Nathalie Oberweis et Sven Clement poursuit la procédure législative. Différents avis ont été sollicités.

Le débat en séance publique sur le projet de loi 7787

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